On les laisse alors pousser tranquillement jusqu’au mois de
juillet. C’est à ce moment-là que Flora et Christelle vont greffer…
La veille, on prélève dans le champ de roses des tiges
de l’année ayant fleuri sur les rosiers que l’on veut multiplier.
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Les feuilles sont coupées au sécateur au niveau du pétiole |
Puis, on ôte
les parties molles des tiges y compris les fleurs. On effeuille en laissant
toutefois la base des feuilles et on enlève les épines.
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Francia ôte les épines à l'aide de gants bien épais |
Enfin les tiges d’une
même variété sont enfermées dans des sacs plastiques, étiquetées et mises au
frais.
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Un petit rafraichissement... |
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... avant emballage et étiquetage. |
Cette étape de préparation est importante car le catalogue de la
pépinière affiche environ 630 variétés de rosiers et bien plus encore. En ajoutant celles qui sont en trop petit nombre et qui de ce fait ne peuvent figurer au catalogue mais sont vendues à la pépinière, on doit bien friser le millier. Dont des variétés
anciennes introuvables, Francia étant passionnée de roses anciennes, en
particulier les obtentions orléanaises pour lesquelles elle a beaucoup œuvré afin
de les remettre en culture. Elle a également un choix important de rosiers
botaniques.
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Vue de la poubelle... ça me fait mal au cœur non? |
En plein champ, les filles vont greffer en écusson (appelée
aussi greffe en T) sur la partie de la racine qui dépasse de la terre et qu’on
nomme le collet.
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En juillet les porte-greffes ont bien poussé |
Pour cela, sur une des tiges préparées la veille et
conservées dans des sachets, on prélève un œil, c’est-à-dire un bourgeon,
avec le greffoir.
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Les tiges préparées par Francia et conservées au frais sont ressorties pour le greffage |
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Le greffon c'est ça : un minuscule bourgeon ! |
Puis on ôte le bois qui se trouve sous le bourgeon en le faisant
rouler sur le doigt.
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Prélèvement d'un bourgeon à l'aide du greffoir |
On pose le pied sur le feuillage du porte-greffe pour bien
le maintenir au sol et dégager sa base. On gratte l’endroit du collet où l’on
va procéder à la greffe avec le dos du greffoir.
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Le collet est gratté c'est la partie qui apparaît en marron clair |
On incise l’écorce de bas en
haut puis sur le haut de l’incision de droite à gauche. On décolle l’écorce.
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Décollage de l'écorce |
On
glisse l’œil et on le fait descendre délicatement dans la fente à l’aide de la
spatule du greffoir.
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Le greffon est délicatement descendu dans la fente |
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Zoom sur le greffon inséré dans le porte greffe |
Enfin on emballe la greffe avec une sorte de cellophane
biodégradable qui a remplacé le raphia utilisé autrefois.
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Emballage de la greffe avec le cellophane biodégradable |
On passe ensuite au rosier suivant… Les rangs semblent
interminables, toujours courbées, les filles répètent leurs gestes avec
précision et rapidité.
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L'outil indispensable pour greffer : le greffoir. Un coté canif et une spatule à l'autre bout |
Les rosiers que nous plantons sont donc issus d’un seul
minuscule bourgeon, sauf les rosiers tiges qui sont greffés sur les branches
hautes et nécessitent quatre greffages. D’où leur coût plus élevé.
La période de greffage des canina est très courte : du
15 juillet au 15 août et est contraignante car il n’est pas possible de
greffer par temps de pluie. Si de l’eau s’insinue entre le bourgeon et le
porte-greffe, la greffe ne prend pas car les moisissures s’y développent. Les
meilleurs taux de réussite sont obtenus en pleine chaleur. Depuis, j’ai toujours
une pensée pour elles lorsqu’il faut très chaud, à cette période, en me disant
qu’elles sont dehors sous un soleil de plomb, à greffer sans relâche.
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Un champ entier à greffer dans cette position... |
Eté, automne puis hiver se passent sans qu’on ait besoin de
s’occuper des rosiers greffés. Mais dès septembre la nouvelle pousse provenant
du greffon est visible.
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Bien rouge, à droite, la nouvelle pousse issue de la greffe tranche par rapport au feuillage vert du porte-greffe. |
C’est en février et mars de l’année suivante qu’une nouvelle
opération est effectuée.
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Un rang avant rabattage. |
Il s’agit du « rabattage ». A l’aide d’une
force (un gros sécateur) on étête le porte-greffe juste au-dessus de la greffe,
éliminant ce qu’il restait du feuillage du porte-greffe. C’est la cicatrice
issue du rabattage qui donne ce cercle se trouvant à la base de chaque rosier
que vous plantez….
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Flora rabattant les rosiers, à droite les rangs déjà faits, à gauche ce qu'il reste à faire. |
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Le rosier après rabattage ici la partie greffée est juste un petit bourgeon,
il faut avoir l’œil!
Le dessus donnera le cercle que vous trouvez sur vos rosiers. |
Puis, pour que les rosiers se ramifient et s’étoffent on
réalise trois à quatre pincements entre fin avril et fin mai. Ils fleurissent
une première fois, en juin, et les champs de Francia et Flora se couvrent de
couleurs. Les greffes sont encore fragiles et peuvent encore casser car les
tiges ont trop poussé et abondamment fleuri. De fortes bourrasques de vent
peuvent à cette période casser la greffe à la base et la décoller du porte-greffe.
Les rosiers galliques notamment y sont sujets plus que les autres.
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Malheureusement le vent a cassé la tige encore fragile de ce rosier
dont la greffe avait pourtant bien fonctionné. |
C’est l’été et on arrose. Les rosiers grandissent et les
mauvaises herbes aussi, fin août il faut désherber. Francia et Flora
n’utilisent aucun produit chimique. Le désherbage est fait au tracteur entre
les rangs et à la binette (eh oui !) entre les rosiers.
Les rosiers grimpants et lianes ont besoin eux d’une opération
supplémentaire car leurs tiges poussent démesurément et courent sur le sol. Il
faut donc en plus pour éviter qu’elles ne s’abîment rattacher ces branches
autour d’un piquet de bambou. C’est ce qui explique le prix généralement plus
élevé des grimpants par rapport aux rosiers buissons.
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Rang de rosiers lianes ou grimpants
avant qu'il soient rattachés sur les piquets en bambou. |
Pendant tout ce cycle en pépinière aucun engrais chimique
n’est utilisé, le sol est fertilisé par une fumure à base de fientes d’oiseaux,
juste après la plantation des porte-greffes, puis après greffage et enfin au
début du printemps suivant. Une pulvérisation à base d’extrait de plantes notamment
de la prêle, de l’ortie et de la fougère est effectuée ainsi qu’un traitement à la bouillie bordelaise
avant arrachage. Si besoin, en fonction de la météo, des traitements curatifs
ponctuels à base de soufre contre l’oïdium, de bouille bordelaise contre le
marsonia et de savon noir en cas d’attaque massive de pucerons peuvent être
réalisés.
A partir de la mi-octobre commence l’arrachage et la
préparation des commandes dans le hangar, au froid.
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Préparation des rosiers pour expédition par Flora. |
Cela durera jusqu’à la
mi-mars environ où les rosiers restants seront arrachés pour être mis en pots
et proposés à la pépinière ou aux fêtes des plantes.
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La serre au mois de mars avec au premier plan les rosiers tiges |
Mais déjà les
porte-greffes de la saison suivante ont été plantés, un nouveau cycle commence…
Voici donc l’histoire de votre rosier avant qu’il arrive
chez vous. Comment il a été élevé, choyé par deux pépiniéristes atypiques et
attachantes. Francia et Flora sont deux femmes respectées dans ce milieu
d’hommes qu’est celui des pépinières.
Je voulais par cet article mettre en lumière leur travail
semblable à celui des petites mains des ateliers de haute couture, précis, minutieux,
rigoureux et si éprouvant physiquement.
Je les remercie infiniment de la confiance qu’elles m’ont accordée,
de la patience dont elles ont fait preuve à mon égard, de leur disponibilité et
de leur savoir qu’elles acceptent de partager sans restriction.
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Un des clichés les plus difficiles : Flora qui accepte enfin de poser! |
Je termine là mon récit et j’espère que dorénavant vous
regarderez différemment votre rosier en pensant à celles et ceux qui y ont mis
tant d’amour et de fierté.
Cette 2ème partie était tout aussi passionnante que la 1ère, merci.
RépondreSupprimerOn comprend mieux le prix de nos rosiers et cela fait réfléchir...
Cet outil, le greffoir, me plait et, je ne sais pas pourquoi, m'émeut un peu aussi.
Bon dimanche,
Aude.
Bonsoir Aude,
SupprimerMoi aussi ce greffoir m'émeut, c'est un bel objet patiné par l'usage. Les voir s'en servir est fascinant.
Bonne semaine
magnifique reportage, quel beau travail, bravo à vous
RépondreSupprimerBonsoir,
SupprimerMerci à Francia et Flora surtout, la passion et la rigueur les guident.
Bonne soirée
C'est un travail avec des gestes précis, il faut un savoir-faire particulier qui vaut parfaitement le prix de nos rosiers achetés à la pépinière qui reste beaucoup plus intéressant que dans les jardineries ou certaines autres pépinières. Bonne soirée !
RépondreSupprimerBonsoir Lulu,
SupprimerPour avoir essayé de greffer lors du cours de greffage il y a 3 ans, j'en ai bien mesuré toute la technicité. Pourtant à les regarder tout parait simple et fluide. Mon essai par contre a été lent et laborieux.
Je suis heureuse que tu mettes en parallèle leur travail et les prix des rosiers à la pépinière qui effectivement sont très intéressants.
Bonne soirée
Le travail des petites mains de la Haute Couture, quelle belle comparaison. Oui, c'est vraiment un travail d'orfèvre. Ton reportage fut passionnant.
RépondreSupprimerBises Béné
Bonsoir Alix,
SupprimerMerci, ça me va droit au cœur.
Le mot orfèvre leur va également très bien tant leur travail est précis et minutieux.
Bises
Si je ne suis pas fan des rosiers en général, en revanche je suis plus que fan et si respectueuse du travail artisanal ...qui est le propre de tous les pépiniéristes passionnés et passionnants quelque soit leur spécialité végétale. Je te remercie donc de ce si bel article particulièrement précis qui montre pas à pas, dans le chaud, dans le froid, les étapes qui permettront aux dingues de roses de pouvoir se pâmer devant elles... je plaide autant que je peux pour que soit protégé le travail de tous ces artisans du végétal qui par les temps qui courent n'ont pas la partie facile ... belle semaine
RépondreSupprimerBonsoir Hélène,
SupprimerJe suis dans la même vision des choses que toi.
Cet article avait pour but de témoigner de leur travail et d'expliquer à ceux et celles qui le lisent combien c'est difficile. Travailler le végétal est chose complexe. Francia et Flora le font avec passion.
Bises
Emouvant sans aucun doute .Passionnant dans ta façon de l'écrire .Comment ne pas être admirative de tout ce travail si astreignant et épuisant !Je ne savais pas qu'on pouvait acheter directement sur place des rosiers anciens et botaniques non proposés à la vente sur catalogue .Intéressant! Belle semaine Bénédicte et merci pour cet excellent article.
RépondreSupprimerCoucou Maryse,
SupprimerSi, si on peux aller à la pépinière acheter sur place des rosiers et également des vivaces et des arbustes.
Si tu viens vers Orléans je serais ravie de t'y amener...
Bises
Ouille ! J'ai mal au dos pour elles !
RépondreSupprimerCes femmes sont plus que respectables. Voilà qui fait réfléchir sur notre façon de consommer. Je penserai à elles à chaque fois que je ferai l'acquisition d'un nouveau rosier.
Bonjour Estelle,
SupprimerFranchement je pense à elles quand il fait super chaud entre le 15 juillet et le 15 août et que je sais qu'elles sont dehors en pleine chaleur.
Très beau reportage!
RépondreSupprimerMerci Agnès!
SupprimerSuper ce reportage,aussi bien que le premier.grâce à toi je vais regarder les rosiers de Francia Thauvin avec un oeil nouveau.
RépondreSupprimerBonsoir,
SupprimerAvec tendresse et respect pour tout le temps qu'elles y ont passé; j'en suis sûre...
Bonne soirée
Deux reportages absolument passionnants! C'est vraiment intéressant de suivre pas à pas leur travail que tu racontes si bien! C'est un travail passionnant mais difficile. Je suis admirative! Rien que les voir ainsi penchées sur leur greffons, ça me casse le dos en 2!
RépondreSupprimerCoucou Malo,
SupprimerRavie que tu ais aimé.
Soupçonnais-tu un tel travail?
Franchement pour le greffage je ne sais pas comment elles font, pourtant lorsqu'on discute avec elles, elles ne se plaignent jamais...
Bises
Toutes mes félicitations pour ce superbe reportage !
RépondreSupprimerMais ces deux personnes pour qui j'ai énormément de respect, méritaient bien ça.
Bonsoir Isabelle,
SupprimerLe but de ce reportage était de montrer qu'on rosier n'est pas un produit de consommation courante et que derrière ce rosier acheté il y a deux femmes qui y ont mis toute leur passion et beaucoup de travail.
Alors oui : respect...
Vraiment merci pour cet éclairage passionnant sur la culture de ces rosiers que nous aimons tant.Grâce à toi nous pouvons mesurer le travail qui permet de les amener jusqu'à nos jardins. J'ai toujours un infini respect pour les artisans et j'admire leur savoir-faire. Bonne semaine. Bises
RépondreSupprimerCoucou Florence,
SupprimerDésolée de te répondre aussi tardivement.
Lorsque j'ai commencée à suivre Francia et Flora je n'imaginais pas l'ampleur de leur travail.
Bises
La deuxième partie de ton reportage est riche d'information sur le travail que représente ce métier de pépiniériste-rosiériste. Merci pour cet hommage aux talentueuses femmes que sont Francia et Flora.
RépondreSupprimerSalut Patrick,
SupprimerJ'ai vraiment beaucoup appris à les suivre.
Bises
Bravo pour ce reportage ,je savais que c’etait Un travail de titan mais là j’en suis admirative .
RépondreSupprimerJ’ai mal au dos rien que de regarder ,comment y arrivez vous car moi je dois jardiner à genoux tant Mon dos me fais souffrir .
Je suis une grande fan de rosiers et je viens de faire votre découverte grâce à Malo .
À très bientôt
Bonjour Maryse,
SupprimerRavie de rencontrer une rosomane grâce à l'adorable Malo.
Bises
Amoureux invétéré des roses, elles sont vraiment magnifiques...
RépondreSupprimerBonsoir,
Supprimeret si vous ne la connaissiez pas déjà, une super pépinière!
Merci beaucoup pour ce reportage absolument passionnant. J'ai trouvé par hasard vos articles en me renseignant sur les porte-greffes. Venant d'une région au sol terriblement calcaire (causses), ce n'est même pas la peine d'essayer des rosiers sans le bon PG.
RépondreSupprimerJe partage complètement votre admiration pour le travail de ces femmes, pour la beauté de leurs gestes. Et en plus j'ai découvert ici une pépinière avec un catalogue fabuleux !!